Oserons-nous un pari audacieux ?

Oserons-nous un pari audacieux ?
 Déclaration du comité de la Fraternité de l'Ancre en vue de l'Assemblée de l'Union des Eglises Protestantes d'Alsace et de Lorraine
Le 16 novembre prochain, les membres de l’Assemblée de l’Union devront se prononcer sur un texte relatif à la bénédiction d’un couple à l’occasion de son mariage. L’enjeu est celui de la bénédiction des couples de même sexe.

A notre sens, ce texte pose essentiellement quatre grandes difficultés qui l’empêcheront de devenir cette parole commune que nous appelons de nos vœux.

Première difficulté : il développe une anthropologie de l’alliance dans laquelle tous ne peuvent pas se reconnaître. Certes, le point 1.3 – résultat d’un amendement apporté par le groupe de travail suite à une remarque de notre part – exprime la nécessité que la conception de l’alliance proposée soit éclairée par « toutes les anthropologies bibliques, notamment celle de la différentiation qui s’exprime dans la différence sexuée ». Mais cela n’enlève rien au fait que l’option prise par les rédacteurs est bien celle d’une anthropologie de l’alliance qui ne peut en aucun cas faire consensus au sien de l’UEPAL.

La deuxième difficulté est liée à la conception de la bénédiction divine d’un mariage qui est exposée au point 1.6 : « La bénédiction religieuse n’est ni une obligation ni un droit ; la bénédiction de Dieu, à l’occasion de son mariage, est un signe et une parole qui disent la bienveillance de Dieu et sa présence pour cette étape de la vie du couple. » Pour nous, cette définition est discutable parce qu’incomplète : il y manque notamment les notions d’approbation et de projet divins. Là encore, il n’y a pas de consensus possible.

Troisième difficulté : « la bénédiction ne relève pas d’un status confessionis mais des adiaphora. » Certes, certains parmi nous peuvent adhérer à cette affirmation du point 2.1.d ; ils l’ont même longtemps défendue au nom de leur passion pour la communion et la diversité réconciliée. Pourtant, force est de constater qu’elle ne fait absolument pas l’unanimité. Nombreux sont ceux, au sein de la Fraternité de l’Ancre et ailleurs, qui considèrent que la bénédiction des couples mariés de même sexe remet en cause notre confession de l’Evangile de Jésus Christ parce qu’elle porte atteinte à l’autorité des Ecritures. Et parmi les partisans de la « bénédiction pour tous », certains affirment que refuser de la pratiquer, c’est trahir le message de la justification par la grâce par le moyen de la foi.

Enfin, la quatrième difficulté figure au point 2.2 qui prévoit que lorsqu’un couple de même sexe demande une bénédiction, le pasteur débatte avec le conseil presbytéral ; avant qu’ensemble ils répondent favorablement ou défavorablement à cette sollicitation. Mais que se passera-t-il lorsqu’il y aura désaccord entre le pasteur et son conseil ? Et lorsque les conseillers presbytéraux seront divisés entre eux ? N’avons-nous pas vu ce que ce type de décision a engendré au sein de certaines paroisses de l’EPUdF ? L’intervention de personnes ressources pour accompagner la réflexion – prévue par le texte – ne suffira certainement pas à apaiser les tensions.

A la lumière des difficultés évoquées, la démarche d’amendement ne nous semble plus envisageable, sauf à reprendre de fond en comble le document proposé.

Que faire ? Oser un pari audacieux en rejetant ce texte pour proposer une véritable démarche d’Eglise où tous – partisans et opposants à la bénédiction des couples mariés de même sexe – nous nous mettions autour d’une table pour prier et travailler ensemble. Le but serait de parvenir à un compromis qui sorte de l’alternative « accorder ou refuser la bénédiction ». Encore faudrait-il que nous acceptions d’un commun accord de faire confiance en la créativité du Saint Esprit et en sa capacité à nous conduire à une décision sage et originale.

Le comité provisoire de la Fraternité de l’Ancre
James Cloyd, Christophe Gonzales, Stéphane Kakouridis, Julien N. Petit, Robert Steck et Jean-François Tomat


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